On tente quelque chose de nouveau ce mois-ci, puisqu’il s’agit d’une nouvelle en plusieurs épisodes!

Alors ça, c’était vraiment, mais alors vraiment pas prévu…
Pourtant, quelque chose aurait dû me glisser la puce à l’oreille. Je ne suis pas superstitieux, mais le message qui était dans mon fortune cookie prenait tout son sens : « Demain sera sûrement pire ». J’avais cru d’abord à une mauvaise blague des collègues, mais ils ont aussi tous trouvé ça bizarre. Même le patron du restaurant ne savait plus où se mettre.
Mais commençons par l’origine de mes déboires.
Suite à une lamentable chute lors d’un triathlon, j’avais dû songer à une reconversion professionnelle. Après des années à me consacrer à ma discipline, je n’avais pas un énorme choix de carrière devant moi. Mon beau-frère m’avait engagé pendant un temps comme secrétaire dans son entreprise, mais il faut bien avouer que j’étais moins efficace que les stagiaires. Il a dû se séparer de moi. Et pas à contrecœur, malgré tout ce qu’il peut dire. Quand ma sœur a suggéré qu’il pouvait peut-être m’employer comme manutentionnaire, mon orgueil en a pris un coup. J’ai préféré dire que j’avais reçu d’autres propositions.
Un jour, je suis tombé sur une annonce sympa dans le tabac du coin. Le château de ma ville recherchait un grand baraqué pour compléter son équipe de reconstitution médiévale. À défaut de mon cerveau, je pouvais toujours mettre mes muscles à profit. Et j’étais très en retard sur mon loyer. Et puis, tailleur de pierre-carrier, ça ne devait pas être bien compliqué. Le responsable n’a même pas regardé mon maigre CV. Mon apparence costaude lui a suffi. Il m’a donné une fiche à apprendre par cœur pour la partie animation. Ça, par contre, ça m’arrangeait moins. Je n’étais pas doué pour m’exprimer, mais bon, il faut ce qu’il faut. Les visiteurs en quête d’explications n’allaient pas me manger, après tout. Enfin, ça, c’est ce que je croyais. Je ne sais pas si vous avez déjà dû répondre à une salve d’interrogations d’enfants, mais c’est à coup sûr plus éprouvant que d’enchaîner les 12 travaux d’Hercule en une heure, je vous assure !
Le boulot se divisait en plusieurs tâches : extraire des blocs de grès ferrugineux de la carrière de la forteresse, réaliser divers ouvrages pour le château et divertir les amateurs et amatrices d’informations historiques. Au final, la plupart des jours je n’expliquais pas grand-chose. Les gens préféraient nettement aller observer les spectacles de rapaces que de poser des questions sur la taille de cailloux. Je ne pouvais pas leur en vouloir. Je les comprenais parfaitement, même. Surtout au vu de la beauté de l’une des fauconnières. J’avais déjà dû rattraper un gamin ayant échappé à la surveillance d’un père trop occupé à reluquer Genny. C’est elle qui m’avait fait le tour de l’ensemble fortifié, m’expliquant tout sur ce fleuron de l’histoire de ma ville et auquel je n’avais pas prêté attention jusqu’alors. Pas plus que pendant notre balade le long des remparts, je dois l’avouer. Je suis un grand benêt quand il s’agit des jolies filles et je n’avais pas réussi à me concentrer sur autre chose que sa frimousse elfique.
La suite, dans un mois!